Blog

Relations Suisse-UE, regard d’une citoyenne engagée

5.10.2023
Partager l'article

26 mai 2021. Vous vous en souvenez peut-être vaguement. C’était le jour où notre Gouvernement a décidé officiellement d’abandonner les négociations liées à l’Accord-cadre avec l’Union européenne. Alors que l’Unioneuropéenne avait déjà admis en 2018 que les négociations étaient finies pour sapart, le Conseil fédéral s’est senti tout à fait à l’aise de claquer la porte des négociations unilatéralement…. 3 ans plus tard.

Les points de discorde ? 3 désaccords sur lesquels nos syndicats et les milieux d’extrême-droite ne voulaient pas lâcher du terrain en agitant la menace du scrutin populaire.

Il y a tout d’abord les « aides d’Etat » (soit des aides favorisant certaines entreprises), la Suisse les encadre moins strictement que l’UE. Ensuite, la protection des salaires pour éviter lasous-enchère salariale dans certaines branches et enfin la Directive sur la libre circulation des citoyens de l’Union. Le simple nom de cette dernière en dit sur pourquoi elle irrite les milieux anti-immigration.

Autant de termes techniques pas vraiment faciles à matérialiser. Ce que j’en tire, c’est surtout qu’il y a eu une volonté forte des populistes de l’UDC et du PS de couler l’accord-cadre pour se positionner et alimenter leur narratif au détriment de celles et ceux qu’ils se disent défendre : soit les travailleurs indigènes. On notera également le soutien assez mou du genou des milieux économiques, du Centre et du PLR à l’accord-cadre. Au-delà de cela, des nombreuses solutions à ces points ont été présentées lors de ces 9 longues années de négociations.

Il s’en est suivi un patacaisse médiatique assez spectaculaire… Puis le monde a continué à tourner et les milieux d’initiés mise à part, cette actualité s’est perdue dans le tourbillon de l’actualité. Les relations entre la Suisse et l’Union européenne ont toujours été tumultueuses. Refus d’entrer dans l’Espace économique européen dans les années 90, volonté populaire forte de ne jamais intégrer l’Union ou encore le oui à l’initiative populaire contre l’immigration de masse, notre grand voisin a de quoi être de mauvais poil.

A mon sens, le plus gros raté de la part de l’ensemble des acteurs côté suisse ayant travaillé sur ce dossier difficile, nos meilleurs négociateurs s’y sont cassé les dents), c’est l’absence d’une communication accessible de ces enjeux à l’opinion publique. En effet, le thème est médiatisé. Cependant, son aspect technico-juridique en fait d’entrée un thème politique moins aisé à saisir. De plus, sa profondeur incroyable n’aide pas. Cela ouvre la porte béante aux populistes de gauche et de droite pour mener leur opposition et jouer sur l’émotionnel.

Depuis mai 2021, nous n’avons pas encore eu le temps de réellement sentir les effets de la dégradation de mois en mois de nos relations avec notre grand voisin. Ce sont plutôt les industries (quelques industries de pointe parmi nos fleurons) ou encore nos universités qui sentent passer cette décision. Les accords bilatéraux s’érodant tranquillement, les discussions (on ne parle même plus de négociations) se poursuivent Caïn Caïn sans que la population s’en rende vraiment compte.

Or, je suis d’avis qu’il serait justement temps que notre classe politique, le Conseil fédéral en tête, prenne les choses en mains pour communiquer positivement au sujet de l’Union européenne en rappelant qu’il s’agit avant tout d’un projet qui permet de maintenir la paix depuis bientôt 80ans en Europe de l’Ouest. Le fait de pouvoir circuler, se former et travailler là on le souhaite sur le continent est aussi un aspect précieux de la construction européenne. Enfin, chiffres à l’appui, i lest aisé de démontrer que l’immense majorité de notre tissu d’entreprises, générateurs d’emplois pour une part non négligeable des travailleurs est directement connecté avec les pays voisins. L'UE est de très loin notre premier partenaire commercial. C'est aussi celui où les échanges sont le plus intenses(investissements croisés) parce qu'ils bénéficient d'un cadre juridique très développé et stable.

Un effet tout à fait palpable de ce fiasco sur le dossier européen va être l’explosion des prix de l’énergie cet hiver. En effet, sans accord sur l’accès au marché de l’énergie, la Suisse, île au milieu de l’Union européenne, s’expose à une instabilité totale des prix, un risque accru de pénuries voire de black-outs, dans un contexte où chacun-e est en train d’effectuer sa transition énergétique et devient peu partageur.

En conclusion, je suis convaincue qu’un accord-cadre aurait été bénéfique à notre pays et que les discussions avec Bruxelles pour sauver ce qu’il reste de nos relations doivent être reprises et communiquer de façon sexy à tout à chacun. C’est un défi immense pour nos politiques et diplomates, mais il est temps qu’ils comprennent qu’il faut sortir de leur bulle pour avoir l’adhésion populaire indispensable pour que la Suisse ne rate pas définitivement le train des relations avec son partenaire démocratique, économique et historique. La Suisse ne peut plus faire cavalier seul. Elle doit avoir la lucidité de sortir de l’impasse et avoir le courage d’agir.

Partager l'article

Faisons connaissance !

Disponible et prête à vous écouter, je vous attends pour des échanges inspirants et constructifs. Réservez votre créneau dès maintenant et partageons nos idées pour un avenir meilleur.